Le paso-doble
HISTORIQUE
L’histoire de l’Espagne, durant le XVIIIe siècle, est
une longue et chaotique succession de monarchies.
Les maisons royales ne cessent de se disputer le pays :
le siècle débute avec la guerre de la Succession qui détrône les Habsbourg,
et s’achève avec la guerre d’Indépendance qui marque le retour des Bourbon.
Dans les campagnes, les Espagnols sont habitués à voir défiler les soldats,
quand ils ne sont pas enrôlés de force dans les armées. Le pas cadencé
des troupes hante leur existence, et c’est tout naturellement qu’il
imprègne leurs danses.
C’est d’une de ces « marches militaires » que le paso-doble tire ses
origines.
Au fil du temps, il perd un peu de son austérité et les classes populaires,
qui s’en sont emparé, lui adjoignent diverses figures (des rotations,
des promenades) empruntées aux danses traditionnelles alors en vogue : la jota, le boléro, la seguiriya et le flamenco.
Le paso-doble aurait pu demeurer une simple variante de ces danses,
sans identité et sans reconnaissance.
Mais, un jour lors d’une corrida, un orchestre joue un air de paso-doble
pour accompagner l’entrée des toreros dans l’arène. La musique, martiale
et virile, correspond en tout point au cérémonial de la corrida et c’est
un franc succès. Bientôt, l’idée fait son chemin et, dès le début du
XIXe siècle, dans toutes les arènes on joue des paso-dobles en ouverture.
Les toreros ne sont pas en reste : ils entrent dans l’arène en esquissant
quelques pas de danse et se livrent à diverses pantomimes de l’art de
toréer pour mettre en scène et magnifier l’entrée du taureau. Après
la corrida, les spectateurs se pressent dans les bals où, sur des airs
de paso-doble, les hommes miment en dansant les postures de la tauromachie.
La cavalière, quant à elle, sert de faire valoir en devenant dans l’imaginaire
masculin – un rien machiste – la cape avec laquelle ces derniers esquivent
vaillamment les assauts d’un taureau imaginaire...
Le paso-doble s’est définitivement construit une identité forte. La
danse plaît ; elle est bientôt pratiquée dans de nombreux bals espagnols.
Gagnant son indépendance par rapport aux corridas, elle ne tarde pas
à traverser les Pyrénées. Les français, moins fervents aficionados,
n’hésitent pas à codifier davantage le paso-doble pour en faire une
danse de salon stylisée, tout en préservant sa symbolique. Ses figures
de base portent d’ailleurs des noms français, tels « le huit » ou
« la cape ». Ainsi estampillé de « bon goût » par les salons français,
le paso-doble gagne bientôt les bals du monde entier.
ESPRIT ET PRINCIPES DE BASE
De la marche militaire, dont le paso-doble tire ses lointaines
origines, la danse a conservé une posture droite et digne. Beaucoup
de ses pas tiennent d’ailleurs de la marche, parfaitement cadencés par
une musique au caractère martial dont le rythme est clairement marqué.
Les mouvements du paso-doble sont par ailleurs très répétitifs.
La posture est digne, mais elle invite le cavalier à être légèrement
dominateur. Le paso-doble passe partiellement pour être une pantomime
de la corrida, où le guideur se transforme, le temps d’une danse, en
torero, pendant que le guidé, docile, devient entre ses mains la cape
dont il use pour toréer.
Un ballet se noue alors avec un taureau imaginaire dont les assauts
semblent marqués par la musique.
RYTHME MUSICAL
Le paso-doble est une danse à deux temps. À tout moment
les danseurs peuvent délaisser une figure plus élaborée pour revenir
à une simple marche.
Le rythme du paso-doble est strict et parfaitement marqué. La musique,
hispanisante, propose souvent des chants inspirés du flamenco qui invitent
les danseurs à se lancer dans des rotations – à deux temps toujours,
il ne s’agit pas de contrefaire la valse
LES PAS
La rotation
Elle est idéale pour prendre le rythme et permettre aux
danseurs de se synchroniser. Son mouvement se fait sur deux temps. Le
guideur avance légèrement son pied gauche puis recule légèrement son
pied droit tout en tournant régulièrement vers sa droite à chaque mouvement.
Le guidé suit en symétrique, il recule son pied gauche puis avance son
pied droit en se laissant entraîner dans la rotation initiée par le
guideur (rotation vers sa droite également).
Ainsi le couple tourne sur place, dans le sens horaire, suivant le rythme
de la musique. Le corps doit être bien droit et éviter de se balancer.
Imaginez un adjudant-chef demandant à sa troupe d’effectuer un
« quart-de-tour-droite ! », mais en couple....
La marche
Il suffit de marcher en rythme. Le guideur avance, le guidé recule. Les corps doivent être bien droits et se déplacer d’un pas martial sans jamais se dandiner.
Le pas de base
Il se fait sur quatre temps, chaque étape (ici numérotées)
durant un temps.
Le départ se fait pieds joints.
Pour le guideur.
1 : Il commence par piétiner sur place du pied droit.
2 : Il avance le pied gauche devant lui faisant reposer le poids du
corps sur celui-ci.
3 : Il ramène le pied droit contre le pied gauche et, sans le poser,
il l’écarte tout de suite latéralement sur la droite (un temps en tout).
4 : Il assemble en ramenant le pied gauche contre le pied droit.
Pendant ce temps le guidé suit en symétrique.
1’ : Il piétine sur place du pied gauche.
2’ : Il recule le pied droit derrière lui.
3’ : Il ramène le pied gauche contre le pied droit et, sans le poser,
il l’écarte tout de suite latéralement sur la gauche.
4’ : Il assemble en ramenant le pied droit contre le pied gauche.
Danser le paso-doble
Pour danser le paso-doble, on alterne les simples marches, les rotations, le pas de base, et les figures. Celles-ci sont nombreuses ; ici nous vous proposons le huit (avant).
Le huit.
Le guideur se contente de piétiner sur place, droite/gauche,
suivant le rythme.
Mais avec sa main droite posée dans le dos du guidé, il indique les
mouvements à faire.
Au départ, pieds joints, le guidé fait un quart de tour sur lui-même
vers sa droite (sens horaire).
Il est maintenant prêt à exécuter les « huit ».
Il avance le pied gauche devant lui.
De par sa position, ce déplacement se fait suivant un axe parallèle
aux épaules du guideur.
Le guidé pose son pied gauche sur la pointe et fait reposer le poids
de son corps sur celui-ci.
Il ramène alors le pied doit contre le pied gauche (le déplacement se
fait toujours sur le même axe). Sans le poser au sol et en prenant appui
sur la jambe gauche, il fait un demi-tour sur lui-même vers sa gauche.
Les pieds restent joints pendant ce demi-tour.
Toujours sans avoir posé le pied droit il l’avance devant lui.
De par sa position, ce déplacement se fait suivant le même axe parallèle
aux épaules du guideur.
Le guidé pose son pied droit sur la pointe et fait reposer le poids
de son corps sur celui-ci. Il ramène alors le pied gauche contre le
pied droit.
Sans le poser au sol et en prenant appui sur sa jambe droite, il fait
un demi-tour sur lui-même vers sa droite. Les pieds restent joints pendant
ce demi-tour.
Il est prêt à reprendre au début des « huit ». La description de cette
figure peut sembler complexe, observez les bons danseurs pour bien la
visualiser.
Cette figure donne vraiment l’impression que le guideur (immobile) torée
et que le guideur est la cape dont le mouvement attire et détourne le
taureau.