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3 - Echos des soirées spéciales


Mardi 9 novembre 1999
Etats d'âme de la semaine : à propos des soirées "à thème".

Vous n'en avez peut être pas conscience, mais La Boîte à Frissons vit à un rythme d'enfer. Faites le compte depuis septembre. Des soirées spéciales : "Les années télés", "La vie en rose" (soirée Piaf), "Irrésistiblement Vartan", Halloween Trans-Genres, Frissons du Monde. Des invités en spectacle : Norbert et Suzy Balboa pour la soirée anniversaire, Charlène Duval, André Kahn (il a chanté Piaf et Vartan), Dominique Gabriel (Vartan). Un concert bal cajun avec Balfa Toujours, des thés-dansants multiples et variés, etc. D'ici la fin de l'année, nous aurons, outre les trois soirées pour remonter le temps (Musette, yéyé, disco), le week-end de la Saint Nicolas et le grand réveillon blanc de l'an 2000.

Et bien parfois, ce programme me donne le tournis et quelques états d'âme. D'autant plus que beaucoup pensent qu'en dehors des soirées du week-end, nous nous tournons les pouces !

Quand, lors de la soirée Piaf, vers 2 h du matin, quelqu'un vient râler en lançant au DJ : y'en a encore pour longtemps avec Piaf ? Tu peux pas mettre "I will survivre" ou "Ya Raha" ?
Très souvent lorsque avec Frédéric nous avons passé une journée à écouter des nouveaux disques pour trouver des chansons ou des musiques ayant un lien avec un thème de soirée (pour Halloween, ou le soir de la techno parade) et que vous vous plaignez "parce que cela ne se danse pas".
Il y a ceux qui détestent Vartan, ceux qui ne supportent pas Dalida, ceux pour qui il n'y a jamais assez de musette, ceux qui ne se lèvent que pour le raï ou le zouc, ceux qui réclament de la techno (ils sont vraiment rares et en général ne reviennent pas, c'est les seuls qui m'énervent pour de vrai !).
Il y a nos décorations qualifiées parfois de "minimalistes" ou pire "à cinq francs six sous", quand elles sont remarquées.
Ou encore, lorsqu'un orchestre est là, et que finalement, vous réclamez des disques, parce que c'est plus varié.

Souvent les soirées ordinaires, celles qui nous demandent le moins de préparation, marchent très bien. Elles sont aussi les plus rentables (forcément !). Alors il est tentant de vous demander : que pensez-vous de cette programmation complexe et harassante ? Séduisante ou rébarbative ? Que préférez-vous : les soirées habituelles, les soirées spéciales ou les deux ? Êtes-vous sensibles, ou honnêtement indifférents à nos pauvres efforts de petits artisans de la nuit parisienne ?


Mardi 11 mai 1999
DarladiDalida : la soirée Dalida

L'histoire remonte à il y a trois ans. Nous étions en pleine préparation de l'Euro-Pride. A l'époque j'étais encore prof dans mon lycée de banlieue, mais aussi Président des Gais Musette. Nous avions lancé l'idée d'un cortège associatif qui devait affirmer au sein de cette marche une composante militante et non commerciale. Pour financer ces chars nous organisions des thés-dansants et des soirées au Tango. C'est ainsi que je fis la connaissance des animateurs du fan club gay de Dalida (Gigi et Bambino). Ils sont venus me trouver pour me demander de les aider à organiser une soirée consacrée à leur star.

J'avoue qu'à l'époque, j'étais plus spécialiste des explications théoriques du chômage et autres crises en banlieue que de la "Dali" (comme ils l'appellent affectueusement). J'ai de suite été emballé par ces fans, ou plutôt par leur passion, quasi maniaque, et follement séduisante. Je leur ai dit OK pour animer leur soirée à condition qu'ils m'aident. Et ils ont été merveilleux : ils m'ont prêté l'intégrale des disques, ils m'ont fait des listes des chansons classées par genre, ils m'ont fait visionné des vidéos. Je me suis plongé dans la biographie écrite par Catherine Rihoit (un vrai roman extra). Après deux mois d'immersion complète, je suis enfin devenu une vraie tapiaule fan de Dalida !

Cette première soirée "DarladiDalida" rencontra un succès délirant, et leur permis de financer leur char à l'Euro-Pride (que je n'ai d'ailleurs même pas vu, étant bloqué à la sono du char des Gais Musette toute l'après-midi).

L'an dernier, devenu maître es-bals de La Boîte à Frissons, j'ai repris, avec la bénédiction de Gigi et Bambino cette soirée Dalida, en faisant venir un transformiste et en améliorant encore la programmation : en réécoutant les quelques 40 CD maintenant en ma possession j'ai notamment découvert un répertoire "musette" inexploité la première année.

La soirée se déroule en évoquant toutes les multiples facettes de la carrière de Dalida. On évoquera en début de soirée les voix de velours très à la mode dans les années 50 (Luis Marianno, Tino Rossi, Gloria Lasso la grande rivale, Milva l'Italienne, Rina Ketty, Dario Moreno...), on entrera dans la nouvelle vague pour twister yéyé, et ensuite les amateurs de disco seront comblés, mais nous aurons aussi l'occasion de faire un tour de la planète (Rio, Le Pirée, L'Egypte, le Liban, le reggae, Israël, etc.), nous n'oublierons pas les slows, dont un des plus célèbres sera chanté en japonais ! Enfin vers la fin de la nuit nous remuerons sur les remix concoctés par le frère Orlando. Et une soirée Dalida ne peut se dérouler sans une danse du tapis...


Chronique du jeudi 17 juin 1999
Le bal des travs

Vendredi dernier nous inaugurions les festivités de la fierté gaie par le bal des travs. Il paraît que j'étais très crédible en tenancière un tantinet vulgaire (pour les absents : robe moulante en peau de serpent, très courte, collant bleus turquoise, perruque brune et maquillage assorti). Je déambulais perché sur mes talons, tantôt mère protectrice, tantôt plus coquine (je profitais de mon déguisement pour tripoter à droite et à gauche les clients à qui je me contente habituellement de sourire, en femme nous pouvons tout nous permettre, c'est génial !).

Nous étions plus de 150 à être travestis et Christine en a transformé 5 en deux tours de main, dont mon expert-comptable qui était ravi de son audace ! Les photos seront présentées dès vendredi soir.

Comme un fait exprès, c'est ce soir là qu'a choisi un ancien élève du lycée où j'étais prof, pour enfin oser me rendre visite : je ne vous raconte pas sa surprise, ni mon amusement. J'imagine qu'à ma réputation de professeur défroqué, parti tenir une boîte de nuit gay, va maintenant s'ajouter des rumeurs les plus farfelues. Avouez que découvrir son ancien prof en trav, c'est encore plus excitant que de l'imaginer simplement dans les bras d'un garçon.


Le bal des célibataires (février 2000)

Certes il se passe toujours quelque chose à La Boîte à Frissons, mais avouons que le premier bal des célibataires mercredi dernier restera dans les mémoires. Nous avons été agréablement surpris de vous voir si nombreux et nombreuses un mercredi soir.

Merci tout d'abord à Jean Pierre (coiffeur 96 rue de La Roquette), qui m'a inspiré l'idée de ce bal, cet été sur une plage Corse, lors d'une grande conversation sur le fonctionnement des agences matrimoniales. J'avais aussi entendu parlé de soirées de ce genre à New York, où les mecs prenaient le micro pour faire leur annonce en direct, sans aucune pudeur. Enfin j'avais envie d'exploiter les cours de sociologie que je donnais jadis à mes élèves sur le mariage. Ne riez pas, cette soirée est vraiment issue de toutes ces influence.

Madame Hervé (robe peau de serpent courte, collant résille) recevait, très excitée, ravie de jouer à l'entremetteuse (à force de me traiter de "Taulière", ou encore moins élégamment de "Mère Maquerelle", j'ai décidé de jouer le jeu et d'être à la hauteur de vos espérances). Elle était assistée en salle par Mademoiselle Gisèle (Damien en tailleur bleu à pois blancs) et aux platines par DJ Frédérick en tenue de vrai mac (costume sombre, cravate, cheveux gominés). Les accessoires furent une boîte à mots doux (chaque célibataire pouvait arborer un badge numéroté de reconnaissance discrète), des boulons et écrous de calibres différents, des balles de tennis pour jouer à la maladie d'amour qui court toujours, des tapis pour la danse du même nom, etc. Impossible de tout raconter, mais voici tout de même deux extraits choisis.

Un moment improvisé fut assez émouvant. Raymond, 60 ans, le célibataire le plus âgé de la salle (veuf en fait), voulait que je lise son annonce. Je lui ai expliqué que cette histoire d'annonces était un jeu et que je ne pouvais pas lire une demande trop sérieuse. Il a paru déçu et a disparu quelques minutes. Je l'ai vu très vite revenir à la charge et me tendre un nouveau papier. Je le lis et félicite aussitôt Raymond. Son annonce était devenue présentable. Je prends le micro, et le présente à une salle dubitative : Raymond est le seul qui a le courage de venir présenter sa requête en public. La salle se déride et applaudi. Je continue en faisant durer le suspense. Raymond recherche un garçon, sans âge défini, ni physique particulier, ou même une fille, mais attention, la personne attendue doit obligatoirement habiter en banlieue, car Raymond cherche quelqu'un qui pourra le raccompagner chez lui du côté d'Argenteuil !

Et ainsi, ce soir là, Raymond n'a pas été obligé d'attendre le premier métro pour rentrer chez lui, il a été raccompagné en voiture par l'un d'entre vous.

L'autre moment, très réussi et surprenant, fut le jeu des préférences culturelles. Certes le physique compte (les histoires de calibres), mais pour bien s'entendre et durer, mieux vaut partager certains goûts. Nous avons donc placé sur la piste un grand nombre de célibataires, puis nous les avons divisés en groupes distincts : d'un côté ceux qui aimaient le sport, de l'autre ceux qui ne l'aimaient pas, puis ceux qui aimaient les chiens et ceux qui aimaient les chats, et enfin, pour finir, ceux qui appréciaient l'accordéon et ceux qui ne l'appréciaient pas. Au bout du compte il y avait huit petits groupes sur la piste, et il suffisait de choisir un mari au sein de son groupe ! La seule fausse note de ce jeu fut qu'un des couples formé en début de soirée se brisa : l'un était non sportif, chat, accordéon et l'autre exactement l'inverse, ils ont aussitôt jugé qu'il valait mieux ne pas braver les lois de la sociologie.

En fin de soirée, c'était à ravir, tant de couples s'embrassant dans tous les coins de la boîte. Promis, nous vous préparerons un nouveau bal des célibataires dans quelques mois.


à suivre...