Sommaire

 

Rainbow attitude


La révélation
Les réponses reçues
Le communiqué des Panthères roses


Cette semaine une révélation de La Taulière :
" Pourquoi je ne suis pas rainbow attitude. "
(Lundi 10 octobre 2003)

Vous ne pouvez pas ne pas avoir remarqué ces affreuses publicités, moches, vulgaires, follophobes, butschphobes et cuirophobes qui envahissent depuis plusieurs mois votre presse communautaire pour annoncer le " premier salon européen gay friendly ". Face à ce déferlement sans précédent (toute la presse gay a été arrosée...) La Taulière se sentait un peu perplexe, mais conservait sa légendaire réserve de commerçante, astreinte à l’obligation de réserve.

La venue d'une représentante de la dite société " Rainbow attitude " dans la nuit de samedi à dimanche au Tango m'a décidé à ouvrir ma grande gueule. J’ai trouvé que cette commerciale avait du mérite de déambuler dans les rues de Paris en pleine nuit en traînant d’énormes piles de flyers et affiches (ses riches patrons ont-ils au moins bien payé ce travail de nuit ?). Toujours est-il que j’ai refusé qu’elle dépose dans ma taule sa cargaison de papier glacé. " Excusez-moi, m’a-t-elle répondu, mais vous ne devez pas savoir de quoi il s’agit ! "
Hélas, me suis-je exclamé, je suis parfaitement au courant, je ne veux pas de votre publicité parce que la tournure prise par votre entreprise me déplait ". La jeune femme m’a regardé, surprise, abasourdie et a conclu par la phrase fatidique qui m’a à la fois flatté et navré : " je ne comprend pas, vous êtes le premier à refuser. "

Et je l’avoue, La Taulière, s’est sentie libre et forte, quoique encore plus déprimée qu’à l’accoutumée. Car franchement, en examinant un instant leurs affiches il y a de quoi s’énerver. La version masculine présente un mec chauve plus tout jeune, efféminé, qui étend sur une corde à linge son attirail érotique en cuir vinyle ; la version lesbienne met en scène une fille au volant d’un camion ! Et le slogan lance " au-delà des clichés ". Vous l’aurez compris, ces affiches invitent les gays, les lesbiennes et leurs amis (tant qu’à faire, ratissons large) à visiter ce salon pour acquérir sans doute la bonne attitude : vous savez, cet homosexuel CSP+, qui sort beaucoup, passe inaperçu, se parfume, s’habille avec goût, se pacse, se déguise de temps en temps en racaille haute couture, part souvent en vacances à l’étranger, et ainsi de suite. Et cette lesbienne, hélas moins bien pourvue en pouvoir d’achat, qui ne doit surtout pas être trop masculine. Bref, vous retrouverez dans ce salon tous les annonceurs habituels qui inspirent déjà si bien la ligne rédactionnelle du très estimé magazine Gay et lesbo-friendly Têtu. L’ensemble est loué et encouragé dans toute la presse gay et lesbienne (mais peut-on être critique vis-à-vis d’un gros annonceur ?), sur le web, et même, plus curieusement par certaines associations dont le Centre Gay et Lesbien de Paris.

Et bien non, votre Taulière n’est pas " rainbow attitude ", elle aime les folles, le cuir, le latex, encore plus le lycra, elle croit en l’union libre, s’entend très bien avec les camionneuses, se laisse guider par ses passions multiples sans consulter les pages publi-rédactionnelles de la presse gay et sera très déprimée si le salon de la semaine prochaine rencontre un beau succès. Gays, lesbiennes, trans, réagissez, retrouvez les bons clichés : restez non-conformes, n’allez pas au salon Rainbow attitude !

PS : la jeune fille passée au Tango a resurgi à La Petite Vertu dimanche soir, toujours chargée de ses paquets de flyers. En me voyant elle a immédiatement compris qu’elle n’avait vraiment pas de chance, et a regretté à haute voix : " ah, on ne m’avait pas prévenu que je vous retrouverai ici... ". Puis, elle m’a demandé, en prenant un air inquisiteur et un ton menaçant : " c’est quoi votre nom de famille ? " Me voilà donc probablement définitivement fiché pour ma mauvaise attitude et rayé de la liste officielle des vieilles pies conformes...


Les réponses :

La Taulière a effectué un tri en retirant tous les messages trop personnels et certains propos excessifs, qui rendus publics, auraient pu s’apparenter à de la diffamation. Elle a ajouté le communiqué des Panthères Roses, beaucoup plus argumenté que son propre coup de gueule.

1)

Ta réaction me fait plaisir. J'ai, de mon côté, envoyé un mail au CGL en leur demandant comment ils pouvaient cautionner ce salon. Une fois de plus, les lesbiennes et les trans sont invisibilisé/es (il s'agit du 1er salon européen gay et gay friendly) et les clichés hétéronormés au point de devenir des méta-clichés.
Moi non plus, je n'irai pas car je ne suis pas une niche commerciale. J'espère que nous serons un max à protester devant l'instrumentalisation à visée commerciale des LGBT.

Christèle


2)

Ma chère Taulière,

Je comprends ta réaction et c'est ainsi que je t'aime. Et je suis de ton avis concernant les affiches qui vont à l'inverse du message "au-delà des clichés" qu'elles disent vouloir véhiculer. Ces affiches sont affligeantes.
Pourtant, à l'inverse de toi, je pense aller à ce salon pour m'en faire une idée car je ne voudrais pas être aussi "normé que les normés". Et si j'y vais, ce sera avec la même liberté d'action et d'esprit que celle qui me mène là où il me plaît d'aller, sans chercher à être toujours compris. De la même façon, un homo peut être csp+, bien habillé et parfumé, voyager à l'étranger et conserver son anti-conformisme et un esprit critique, non ?!
Car je n'aime pas non plus l'intolérance dans laquelle peut mener un anti-conformisme systématique et jusque boutiste. Il y a des degrés divers à l'idée de ne pas être un mouton et chacun vit avec son passé, ses casseroles, sa personnalité, sa force de caractère, son intelligence, sa sensibilité. Fatigué, lassé, blessé ou en souffrance, on fait parfois plus ce qu'on peut que ce que l'on veut. Alors, on peut pas jeter la pierre à ceux qui veulent être lisses et ne pas être "reconnus", mais c'est peut-être aussi un instinct de survie pour certains. Il m'est arrivé de m'énerver face à de telles attitudes qui m'apparaissaient comme lâches et égoïstes mais en même temps, on n'est pas tous égaux face aux difficultés de la vie, donc je me suis assoupli sur le sujet...
Je me fais là l'avocat du diable mais c'est parce que si j'apprécie beaucoup ton esprit critique, ton ouverture aux autres, ton attention et ton respect des différences de chacun; là, c'est peut-être un peu un procès d'intention envers un salon qui n'a jamais encore eu lieu et où tu n'est pas allé... Mais promis, la prochaine fois que je viens au Tango ou à La Petite Vertu après être allé au salon Rainbow attitude (nom ringard au possible à noter d'ailleurs au passage !), je me ferai un plaisir de t'en livrer un rapport détaillé !!.. Je ne sais pas quoi faire pour te faire plaisir !

Tendrement, Alain.


3)

Bravo la taulière !!!

Le décryptage de la "rainbow attitude" est intéressant et j'ai fwd le courriel de la BAF à tout mon carnet email avec un petit mot de ma part disant que j'applaudissais des 2 mains... On ne s’est pas battus, après avoir souffert toute notre jeunesse (si loin déjà...), d'un Complexe de Folle pour pouvoir être comme on veut quand on veut selon ce que l'on est ou simplement pouvoir rire et s'amuser avec des amis encore plus folles sans penser au regard du quidam, pour retomber dans cette espèce de moralisation de l'homosexualité et de sa mise dans une petite boite bourgeoise et bien pensante.

Sergio (louisette)


4)

En effet, c'est dommage, tu ne recevras pas d'invitation pour assister à ce merveilleux salon de la gaytitude bien pensante. :-)
J'comptais pas y aller, je trouvais lamentable l'idée d'un tel salon (et je persiste), mais comme on m'a trouvé un pass, je vais m'y rendre quand même... pour démarcher ces gentilles entreprises "gay friendly" et essayer de leur grapiller à mon tour quelques sous.
Je crains que de toute façon ce salon aura du succès : ils ont fait trop de matraquage publicitaire pour que ça ne soit pas le cas et de voir leurs pubs dans les catalogues des VPCistes ou dans la presse va en inciter plus d'un à passer un week-end à la capitale. Seront-ils habillés en blanc comme au Gay Day de Disneyland Paris ? Y aura-t-il des ratonnades en fin de journée autour du parc des Expositions ?
Bonne semaine et merci d'affirmer une nouvelle fois tes convictions argumentées.

Patrick


5)

Ben je suis pas tout a fait d'accord, le non conformisme profite a peux d'élus qui ont le caractère pour l'assumer. Que faite vous des 10% de la population qui est homosexuelle et ne peut pas vivre sa sexualité, étape souvent indispensable à son épanouissement ?
Bises,

Pascal


6)

Passé la surprise d'avoir reçu dès le lundi le mail habituel de la Taulière je suis ravi d'avoir lu ce que j'ai lu. Je suis plutôt TETU conforme mais tant l'objectif que la promotion autour de ce salon anglophone par ailleurs me désespèrent en termes de promotion, de clichés et d'assimilation des gays en leur diversité à une communauté de caniches qui se réjouiront de trouver en un seul lieu TOUT POUR LE TOUTOUT.
Le plus dommage c'est que beaucoup de gens et d'associations se laissent embobiner pour crédibiliser cette opération promotionnelle de je ne sais quels produits.
Donc Merci de ce coup de gueule.

Bonne semaine !


7)

Bien joué, je crois qu’on aurait été un certain nombre à être déçu de trouver de la pub pour ce salon chez toi. Ce qui me gène le plus, c’est qu’une fois de plus, TF1 va se jeter sur l’évènement, et que ce salon va être l’étalon de mesure d’un soi disant monde gay et lesbien. Quand je vois qu’au boulot les gens me parlent déjà de ça, argh...
Bonne continuation. Bisous

Cyrille


8)

Bonjour!

Tout à fait d'accord avec toi !
J'étais d'ailleurs morte de rire en recevant à mon adresse perso une pub de ce salon accompagnée d'une pub pour un week-end lesbien et pour le serveur minitel dyke (le minitel existe encore..). Comment sommes-nous fichés ?
A quand un salon hétéro ? Ce sera sans doute le signe véritable que les temps auront changé !

Bises
Mimi


9)

Pour ma part, votre réaction m'aurait laissé tout aussi perplexe. Je n'ai pas compris pourquoi vous refusez de soutenir le premier salon gay de France ? Parce que la pub ne vous plait pas ? C’est un peu léger. Parce qu'il est trop commercial ? C’est cependant la seule façon d'organiser un salon digne de ce nom. Quand à se réjouir par avance d'un éventuel échec, ça me dépasse totalement.
Pour ma part, j’irai au salon en espérant qu'il connaîtra un vif succès et qu'il contribuera un peu plus à intégrer les gays dans la société française.

Frédéric


10)

Entièrement d'accord avec toi !
Nous non plus, nous ne sommes pas de la "rainbow attitude", et nous n'irons pas au salon !

Jean-Luc et Sylvain.


11)

Un avis perso et je parle pour ma tronche : le salon rainbow attitude est une dépolitisation des luttes LGBT par le biais de la consommation. Nous voulons être reconnus pour ce que nous sommes, pas pour notre pouvoir d'achat. D'où l'absence des gouines et des trans dans la promo, ils et elles ne rapportent rien financièrement à l'heure actuelle ! Du reste, le seul partenariat avec le SNEG groupement capitaliste qui nous enferme dans la consommation irréfreinée et la réussite individuelle au détriment des luttes collectives n’en est que la triste conséquence. Ils n'auront ni mon fric ni ma caution.
Du reste, tu n'es pas le seul à avoir refuser ces tristes sires nous aussi dans notre assoc, on les a vu venir, pour des raisons bien plus modérées du reste que celles décrites ci dessus (je suis l'unique anarchiste de la bande à mon grand regret) mais nous ils nous avaient carrément envoyé un papier officiel genre "on prend bien note que vous ne voulez pas participer..."
Ca sent la menace et les petits papiers, en tout cas, on n’a pas été dupe !

Virginie inspirée par le claaaaaash.


12)

Toutes mes félicitations. Je partage entièrement ton point de vue. La mercantilo-grotesquo-frico-fun-fair du week-end prochain m'afflige complètement. Son flop, que j'appelle de mes voeux sera pour nous - gays évolués et lettrés - le moyen de sabrer le champagne dans tous nos lieux favoris.
J'ai déjà été attristé au point de mettre 12 mois pour accepter la disparition en 1999 de notre cher Ex-Aequo. Cet assassinat à distance, par une association socialo-fachiste rémoise, piloté, j'en suis maintenant intimement persuadé, par un journal concurrent (feuille de chou en papier glacé qui non contente de présenter des sujets de plus en plus grotesques et déplacés, s'emploie à faire de la désinformation).
Y a-t- il dans notre pays des tapettes lettrées prêtent à nous rejoindre

Baby Lony


13)

Moche, vulgaire, follophobe, butchophobe, cuirophobe; que de grands mots ! J’ai trouvé pour ma part ces publicités amusante et fraîches. Après tout ce sont des publicités destinées à un affichage grand public, et elles sont suffisamment décalées à mon goût tout en restant simples et finalement assez neutres. Mais tout est une question de point de vue ! Quand au slogan "au delà des clichés", il résume assez bien le but du jeu ; nous ne sommes pas (malheureusement ou heureusement, peu importe) tous follophiles, butchophiles, cuirophiles..., et je ne vois pas ce qu'il y a de mal à vouloir ratisser large.

Je ne suis pas une folle (quoique, certains jours je dois bien l'être aussi), je ne suis pas butch non plus (quoique, d'autres pourraient le penser), je ne suis pas cuir ou latex ou lycra, je me contre fiche de l'union libre, mais je n'ai rien contre les folles, butchs, le cuir, le latex...etc. Je crois intimement que tout le monde a le droit de vivre comme il l'entend, j'irai à ce salon, j'espère que d'autres iront aussi, et je ne comprends pas le sectarisme des gens qui voudraient que tout le monde soit revendicateur et affiche ostensiblement sa différence. Je suis pour le droit à l'indifférence, autant que pour le droit à la différence. Et le désir de non-conformité à tout prix est pour moi tout aussi réducteur et ridicule que le désir de conformité. Mais bon, à chacun sa croix !
Cette réaction me surprend d'autant plus que je n'ai pas eu l'impression en allant danser au Tango d'être dans un lieu subversif, bien au contraire ! A moins que le subversif ce soit de voir deux hommes ou deux femmes danser ensemble, mais nous n'attachons pas dans ce cas le même sens au mot subversif...
"Vous l'avez compris, ces affiches invitent les gays, les lesbiennes et leurs amis à visiter ce salon pour acquérir sans doute la bonne attitude", quelle idée farfelue ! Personnellement je pense que ce salon a juste pour but de nous montrer un panorama de ce qu'être gay aujourd'hui peut être, je ne pense pas que le but du jeu soit de nous une inculquer une "bonne attitude". D'ailleurs je crois savoir que beaucoup de sociétés ont refusé d'y participer (par peur de se mouiller ?). Y trouvera t-on par exemple un stand subversif du Tango avec une Madame Hervé en grande tenue ? Je crois que la réponse est inutile...
Mais bon ça ne m'empêchera pas de continuer à aller danser au Tango, j'essaierai juste d'être un peu plus transgressif la prochaine fois (en buvant et fumant sur la piste de danse ? en faisant des choses obscènes dans les toilettes ? En osant ôter ma chemise pour montrer mes piercings ? En portant un harnais de cuir ? ..... Je ne suis pas certain finalement que ça aille vraiment avec l'image du lieu !)
Bonne fin de journée


14)

Bonjour,
Cela m'amuse de voir les gays refuser de devenir une "niche commerciale". Ils le sont, qu'ils le veuillent ou non. Mais ils ne l'assument pas. Et c'est mine de rien une avancée sociale qu'ils semblent ne pas réaliser. On a tellement l'habitude d'être intègre à Paris qu'on oublie qu'en province il n'est pas tous les jours gai d'être gay. Alors, l'homosexualité banalisée au point d'être l'objet d'un salon comme le sont les amateurs de jeux, de voitures, les parents, les créateurs d'entreprises, les pro-bio, les amis des animaux, les fous des plantes, ce serait une horreur ? Mais on veut le droit à l'indifférence, à l'intégration, oui ou merde ? On veut être considérés comme des parents comme les autres, comme des êtres humains (et donc des consommateurs) comme les autres ou être toujours mis au ban de la société, inexistants, honteux ? Ah non, on veut (certains veulent, mais il serait bon de leur rappeler qu'ils ne sont pas seuls dans la population gay, plurielle par définition) à la fois être intégrés ET reconnus : le droit d'être folles mais personne ne doit ni dire "les homos sont tous des folles", ni le contraire. Les homos sont pluriels, et l'humour décalé de ces affiches l'illustrait bien. Efféminé, l'homme étendant son linge ? Je ne trouve pas, vu son gabarit ! Est-ce le fait qu'il étende son linge qui est considéré comme féminin ? Ou l'air délicat qu'il affecte ? Cet air délicat qui contraste avec la lingerie SM qu'il étend, d'ou le décalage : cette affiche dit "on peut être délicat ET SM, ou ne pas l'être", tout comme celle de la fille dit "on peut être lesbienne et féminine, ou camionneuse" : oui le cliché de la lesbienne masculine, mal-baisée est encore d'actualité, oui ces affiches s'adressent aussi aux hétéros pour leur dire "nous sommes homos, nous sommes pluriels, variés". C'est cela que vous refusez ? Mais vous voulez quoi, à la fin ?

Le salon de l'agriculture, des bébés & parents (le week end prochain), le Salon bio de Marjolaine (le mois prochain) et d'autres, ne déclenchent pas un telle levée de boucliers de la part des populations concernées, qui s'y rendent en toute conscience de leur état d'"objet commercial". Car c'est une reconnaissance de notre existence, de notre importance politique et économique. De "l'homosexualité, ce douloureux problème" nous sommes passés à "l'homosexualité, cette caractéristique qui, comme d'autres, fait un client commercial particulier" : nous sommes reconnus comme élément de la société. On peut déplorer que ne soit retenu que notre potentiel économique (mais a quoi sert un Salon, à votre avis, à part gagner de l'argent ? Vous savez combien coûte un Hall à la Porte de Versailles ?), que soient écartées lesbiennes (bon, pas complètement, elles apparaissent sur les affiches) et trans, que le prix d'entrée soit aussi élevé, on peut regretter plein de choses mais pas d'avoir enfin droit de cité.

Au fait, Hervé, avec ton bar, tu ne t'adresses pas au potentiel économique des gays par hasard ? Hou, ce n’est pas bien ! Voila jusqu'ou peut aller le ridicule de ne pas s'assumer : tu gagnes des sous grâce aux gays et tu t'insurges quand d'autres font de même. Ce n'est pas un peu (voir beaucoup) hypocrite ?

Leo


Communiqué des Panthères Roses

DEUX HOMMES, UNE FEMME, UNE POSSIBILITÉ : TROIS IMPOSTEURS

Vous ne pouvez l'ignorer : " l’événement gay de ce début de XXIème siècle " - comprenez le salon " Rainbow Attitude " - se tiendra les 18 et 19 octobre prochains.
Il y a là lieu de se réjouir, paraît-il. La date est idéale : " octobre, c’est loin du Forum des Associations, qui a lieu en mars, et de la Gay Pride, en juin "  (1). Le lieu est idyllique : " l’espace offert par le Hall 6 s’avère passionnant "  (2). Les organisateurs sont des gens merveilleux : " pour moi, c’est politique. C’est un acte militant. Je ne fais pas tout ça pour flatter mon ego, pour en retirer un bénéfice personnel "  (3). Ils " n’appartiennent à aucun parti, ne militent pour aucune association, n’ont pas d’arrière-pensée commerciale, mais se savent une légitimité "  (4). Tous ces satisfecit délivrés aux organisateurs par les organisateurs, par leurs sponsors et par voie de presse, comment dire, tout cela nous interpelle au niveau des écus. Ce salon serait donc le parfait complément du Forum des associations et de la Marche des fiertés LGBT (qui, au passage, perd ses "L", ses "B" et ses "T").

Regardons de plus près la plaquette destinée aux exposants pour en avoir le cœur net :

Toujours plus courtisée, la majorité de la population homosexuelle souhaite le " droit à l’indifférence ". Mais elle aspire aussi à une reconnaissance " gay-friendly ", y compris sur le marché économique.

Tous profils confondus, la population gay, lesbienne, bi et trans :

Précurseurs de tendances identifiés, ils sont aussi un remarquable "terrain d'expériences marketing" : si un produit passe le "test gay" avec succès, le grand public suivra.

Tiens, tiens, c’est pas une arrière-pensée commerciale, ça ?
Nous voilà profiléEs, cibléEs, courtiséEs, identifiéEs, par des personnes bienveillantes disposées à nous reconnaître, y compris, ou peut-être bien uniquement, sur le marché économique. Nous, c’est-à-dire les " happy few " qui ont la fortune – c’est le cas de le dire – d’être gays, blancs et aisés. Exit lesbiennes, trans, désargentéEs grave et autres " unhappy many " !
Et nous sommes heureuses d’apprendre au passage que les LGBT sont attachées aux valeurs traditionnelles, à commencer par la famille. En témoignent celles et ceux qui ont été affectueusement misES à la porte pour orientation sexuelle non-traditionnelle.

Associations alibi ?

Pire encore, on nous explique que Rainbow Attitude " n’aurait pas existé si des Baudry, des Hocquenghem ou des Perin (…) n’avaient pas contribué chacun à leur manière à sortir les populations LGBT de l’ombre et leur permettre la liberté de choix due à chacun "  (6). Les morts, c’est pratique, ça ne fait pas de procès... Toujours est-il que de nombreuses associations LGBT ont accepté l’invitation. Il est vrai que ce salon est hautement militant, puisqu’il comprend un espace conférence traitant de thèmes comme " la nouvelle économie gay friendly " ou " les entreprises et les homosexualités "… Et en alibi : " coming out, suicide et prévention ".

Imposture attitude

Et c'est là que se dévoile l'imposture Rainbow Attitude : faire passer une opération marketing pour un salon associatif militant. La prétendue visibilité que Rainbow Attitude nous vend à grand renfort de publicités n’est autre qu’une branchitude réservée à ceux qui ont le pouvoir d’achat adapté. Et la reconnaissance que ce salon nous promet se paye à prix fort : ce sont nos identités qui sont en jeu. Souhaitons-nous être réduitEs à de simples précurseurs de tendances ?
Si nous luttons contre les discriminations, ce n’est pas pour que fleurissent, en lieu et place de ces discriminations, des clivages socio-économiques tout aussi dévastateurs et, en un mot, dégueulasses. Or, la présence de structures associatives à ce salon offre une légitimité à la démarche mercantile des organisateurs. En témoigne la réponse de Régine Corti (déléguée générale) au magazine Têtu, lorsque celui-ci l’interroge sur une éventuelle récupération commerciale : " Nous avons offert 500 m2 aux associations " !

Refusons que 30 ans de luttes pour l’égalité des droits, pour une reconnaissance sociale des individus quelle que soient leurs identités sexuelles et identité de genre soient soldées au profit d’une existence sociale par et pour le fric !

Refusons de servir d’alibi !

Les Panthères roses.
http://pantheresroses.free.fr


[1] Propos tenus par Philippe Sultan, organisateur, à l’occasion d’une interview intitulée " Deux hommes, une femme, une possibilité : Rainbow Attitude ", dossier de presse du salon.
[2] Propos tenus par Jean-Claude Sultan, organisateur, dans l’entretien sus-cité.
[3] Propos tenus par Régine Corti, organisatrice, dans le même entretien.
[4] Cf. introduction à l’entretien sus-cité.
[5] Cf. plaquette destinée aux exposants (http://www.rainbowattitude.com/site/plaquette.pdf).
[6] Cf. présentation du salon dans le dossier de presse : " Le salon Rainbow Attitude ".


à suivre...